Quand les petits chœurs du CRÉA rencontrent une grande dame de la chanson française ! Depuis septembre 2014, les 60 jeunes interprètes des chœurs d’Éveil et de l’Avant-Scène ont eu le plaisir de travailler autour d’ Un poirier m’a dit, un conte musical de 17 chansons commandé à Michèle Bernard. Auteure, compositrice et interprète, Michèle Bernard distille depuis plus de 35 ans de sa voix limpide des textes poétiques, subtils, des compostions touchantes pour petits et grands. Un univers musical, un travail collectif d’une artiste à part que vous pourrez (re) découvrir les 28, 29 mai à l’occasion de la 5 édition d’Il était une Voix.
Michèle Bernard (© Catherine Cour).
CRÉA BLOG : Vous êtes une artiste prolixe, auteure de plus de 250 chansons, 13 albums. Vous vous produisez dans toute la France loin des paillettes et des plateaux télé. Pourquoi avez-vous accepté la proposition de composer un conte musical pour les petits chœurs du CRÉA ?
Michèle BERNARD : Tout d’abord, je connais la qualité du travail effectué dans le cadre du CRÉA, je suis venue les écouter, et j’ai aussi assisté au spectacle Les indiens sont à l’Ouest, j’ai senti à travers tous ces projets la dynamique qui porte cette équipe, et dans cette époque désenchantée, c’est agréable de croiser cela. Et puis, c’est une chose d’écrire des chansons, et je l’ai beaucoup fait, c’est vrai, mais c’en est une autre d’écrire un ensemble de chansons, destinées à un chœur d’enfants qui vont avoir à raconter une histoire avec ça. Ce pari m’a plu.
CB : Vous êtes reconnue comme une grande poétesse de la chanson française. Pour ce conte musical, où avez-vous puisé votre inspiration ? Vers quels horizons, voyage souhaitez-vous embarquer les interprètes et le public ?
MB : N’étant pas librettiste, j’ai d’abord voulu m’inspirer d’un conte existant, et puis je suis tombée sur un petit recueil de poèmes intitulé « Poirier proche », écrit par Jean-Claude Touzeil, un poète qui me touche beaucoup. Chaque poème est consacré au poirier qu’il voit de la fenêtre de sa maison. Petit sujet me direz vous, mais qui permet curieusement de parler de toutes les choses de la vie. J’aime ça : partir du quotidien le plus banal pour en extraire la poésie et le sens caché. Ici, pas de héros flamboyant, pas d’actions extraordinaires, je suis bien consciente que cette démarche est un peu « décalée », mais c’est encore un pari…
CB : Au cours de la saison, nos petits interprètes ont eu le plaisir de partager, d’échanger avec vous lors de deux week-ends de création organisés en province. Composer pour ces/les enfants, est-ce un exercice à part ? Vous excellez dans les deux registres, chansons pour enfants et chansons pour adultes, mais comment en êtes-vous arrivée à écrire plus spécifiquement pour les enfants ?
MB : Au départ, il y a quelques années, j’ai répondu à une commande de chansons pour une école de musique à Lyon. C’était un exercice de style, une exigence de simplicité, de limpidité, et surtout de sincérité, car cela m’a permis de reconnecter la petite fille que j’ai été et que je demeure aussi au fond de moi. Ces chansons ont fait leur chemin, et j’ai vu qu’elles commençaient à circuler dans les écoles, les écoles de musique. Puis je me suis aperçue que des chansons que j’avais écrites pour les adultes touchaient également les enfants. Je pense à « Nomade » ou « Maria Susanna » par exemple. Alors, depuis, pour moi, la frontière entre les deux écritures est bien mince….
CB : Après sa création, « Un poirier m’a dit » sera enregistré par les enfants du CRÉA*, l’occasion pour ce répertoire comme bon nombre de vos chansons, de se voir repris en milieu scolaire, dans les écoles de musique, les maîtrises, les chorales… Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
MB : Pour tout vous dire, entrer dans le monde des auteurs de chansons pour enfants m’a fait peur. Je suis une chanteuse qui s’adresse essentiellement à des publics d’adultes, et j’y tiens ! Mais à ce stade de mon parcours, l’idée de transmettre ce qui me touche dans cet art magnifique de la chanson, l’idée qu’une ou deux d’entre elles vivent leur vie au delà de moi, prennent leur place dans des souvenirs, je me dis que c’est un beau cadeau de la vie ! Comme la trace lumineuse que m’ont laissé « Mes jeunes années » de Charles Trenet, entonnées par ma classe, pour la fête de fin d’année dans la cour de mon école primaire.
CB : Vous êtes en perpétuel mouvement, votre dernier spectacle « Sens dessus dessous » (2012-2014) a reçu d’excellentes critiques (Grand prix Musique Jeune Public ADAMI 2013, Coup de cœur de l’Académie Charles Cros). Où aurons-nous le plaisir de vous retrouver? Quels sont vos projets à venir?
MB : Nous avons tourné avec mes musiciens, pendant trois saisons, ce spectacle pour tous publics (« Sens Dessus Dessous ») qui se situait justement au cœur de cette idée qu’il est un endroit où certaines chansons peuvent toucher un enfant, un adulte, une personne âgée, sans discrimination. C’était notre pari, et il a fonctionné avec bonheur. Cette saison, je poursuivrai mes concerts en duo avec Jean-Luc Michel, qui a écrit les arrangements musicaux d’ « Un Poirier m’a dit », et en trio avec une création intitulée « Les Petites Boites » Mais je me consacrerai surtout à l’écriture d’un nouveau CD qui devrait voir la lumière au Printemps 2016.
Michèle Bernard en bref
Formée au conservatoire d’Art dramatique de Lyon, suivi de plusieurs années de théâtre. (TJA, Compagnie de la Satire, Compagnie Les Mulets). À partir de 1975, Michèle Bernard choisit la chanson comme mode d’expression, d’abord comme interprète, puis comme auteure et compositrice (en 1978, elle est la révélation, découverte de l’année du Printemps de Bourges).
Femme aux multiples talents, elle compose aussi des musiques pour le cinéma (« La Chanson du Mal Aimé » de Claude Weiss), la télévision (« Soleil Noir », « Groupe octobre » de Michel Van Zele) le théâtre (« Jacquard ou la Chanson de la Soie » de Dominique Voisin, « Monsieur de Pourceaugnac » Cie la chenille, « Ubu Roi » Grat/Cie Jean Louis Hourdin, « le Théâtre ambulant Chopalovich » les Fédérés…) la danse ( « Le petit cheval de Mexico » chorégraphie Maryse Delente, Ballet de Lyon).
Elle signe quelques mises en scène, écrit pour les enfants, créé sans cesse de nouveaux spectacles (Divas’Blues, « Une fois qu’on s’est tout dit », « L’Oiseau Noir du Champ fauve », « Cantate pour Louise Michel », « le Nez en l’Air », les « Nuits Noires de Monde »…) et a à son actif l’enregistrement de 13 albums.
Depuis 1980, elle habite un petit village du département de la Loire. Elle y a créé l’association « Musique à l’usine ». Cette structure propose des stages, des festivals auxquels ont participé notamment deux autres grandes dames de la chanson française. Anne-Sylvestre, son amie de longue date et… Juliette, compositrice de la dernière création du CRÉA « Les Indiens sont à l’Ouest » jouée au théâtre du Châtelet en avril dernier.
Son parcours musical a été ponctué de 4 prix de l’Académie Charles Cros et sont dernier spectacle « Sens dessus dessous » a reçu le Gand Prix Musique Jeune Public ADAMI en 2013.
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